Ce jeudi 18 février, l’astromobile Perseverance s’est posée sur le sol martien pour en étudier la composition rocheuse dans le cadre de la mission spatiale d’exploration Mars 2020 de l’agence spatiale américaine (NASA).

Après un voyage de près de 7 mois dans l’espace sur une distance de 471 000 000 km, Perseverance rejoindra le rover Curiosity de la mission MSL (Mars Science Laboratory) qui explore le cratère Gale depuis son arrivée sur mars en août 2012. Son atterrissage à haut risque sur la planète rouge qui sera sans doute l’événement spatial de l’année 2021 était à suivre en direct. (Voir plus bas)

 

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Présentant les caractéristiques les plus proches de celles de la Terre parmi les planètes de notre système solaire, Mars fascine les scientifiques qui l’étudient depuis le début des missions d’exploration du système solaire. Les choses se sont accélérées au cours des deux dernières décennies sous l’impulsion de la NASA et de l’arrivée sur le sol martien de plusieurs sondes ayant permis des avancées scientifiques majeures pour la connaissance physique de la planète et de son histoire ; prouvant par exemple la présence d’eau à sa surface. Curiosity, sans doute la plus connue d’entre elles, a récemment établi la présence de molécules organiques indispensable à la formation de la vie.

/// Préparer l’exploration humaine

Avec Perseverance et ses 7 instruments scientifiques de haute technologie, la NASA et ses partenaires exploreront des environnements anciens de la planète Mars pour déchiffrer son histoire géologique,  caractériser son habitabilité passée et rechercher d’éventuelles biosignatures, qui constitueraient des traces de vie ancienne.

Cette nouvelle mission va aussi préparer l’exploration humaine de Mars en testant de nouvelles technologies, en précisant les conditions qui règnent à la surface de la planète (niveau de rayonnement, variation de température, diffusion des poussières, …)  pour notamment améliorer la connaissance des conditions de rentrée atmosphérique.

Perseverance doit enfin collecter des échantillons de la surface martienne qui seront récupérés et rapportés sur Terre dans le cadre de missions conjointes entre les Etats-Unis et l’Europe (MSR, Mars Sample Return) prévues pour un lancement en 2026. 

C’est une future mission américaine dont la date n’est pas totalement arrêtée qui déposera une plateforme avec un petit rover européen (Sample Fetch Rover (SFR) chargé de récupérer les tubes d’échantillons rocheux collectés par Perseverance (au minimum 20 avec un objectif d’environ 35) et qui seront introduits par un bras robotique dans un conteneur au sommet d’une petite fusée, Mars Ascent Vehicule, qui placera le tout en orbite autour de Mars. Le satellite européen Earth Return Orbiter (ERO) déjà placé en orbite martienne, capturera enfin le conteneur et véhiculera les échantillons martiens vers la terre, où il sont attendus pour le début des années 2030.

La mission nominale de Perseverance est prévue pour 1,5 années martiennes, soit 1000 sols (jours martiens, 1 jour martien = 24h et 40 min), soit 1030 jours terrestres. La mission Mars 2020 de la NASA représente un investissement de 2,44 milliards de dollars, dont 576 millions de dollars pour le lancement, et 456 millions de dollars pour le déroulement des opérations sur trois ans à la surface de Mars.

/// Caractéristiques de Perseverance 

Le rover Perseverance reprend l’essentiel de l’architecture du rover Curiosity de la mission MSL (Mars Science Laboratory) mais bénéficie d’avancées et d’améliorations de nombreux sous-systèmes (roues beaucoup plus résistantes, ….).

Avec ses 3 mètres de long, ses 2,7 mètres de large pour une hauteur de 2,2 mètres, Perseverance affiche une masse totale de 1 050 kilogrammes, soit l’équivalent d’un petit SUV. 

Sa partie supérieure est équipée d’un mât qui, une fois déployé, peut prendre des images durant les déplacements et porte la partie extérieure de SuperCam. Le bras robotique, fixé sur la face avant, porte des instruments d’observation, d’analyse, de forage et de conditionnement des prélèvements.

Le rover embarque deux ordinateurs de bord identiques pouvant se suppléer pour transmettre les instructions aux instruments, récupérer et stocker les données avant de les envoyer vers la Terre. 

/// La charge utile embarquée

Perseverance embarque 7 nouveaux instruments scientifiques représentant 7% de sa masse et dispose d’un système innovant de prélèvement et de conditionnement d’échantillons du sol martien dans des conteneurs ultra propres, stériles et hermétiquement scellés qui seront récupérés plus tard.

• SuperCam : instrument franco-américain, c’est une version améliorée de ChemCam qui équipe le rover Curiosity.  Spécialement construit par la France en collaboration avec le CNES pour étudier la géologie de Mars, c’est l’instrument scientifique le plus lourd de Perseverance (6 kg).

Il est constitué d’un ensemble instrumental réunissant 5 techniques de mesures différentes grâce à 3 spectromètres (LIBS, RAMAN et Infrarouge), une caméra et un microphone et se place au plus haut du rover Perseverance pour pouvoir réaliser à distance ses analyses de la composition chimique et minéralogique des roches.

• Mastcam-Z : instrument américain constitué d’un ensemble de caméras, il est également une version améliorée de Mastcam, embarqué sur Curiosity, mais dispose d’un zoom. 

• RIMFAX (Radar Imager for Mars Subsurface Exploration) : développé par un institut de recherche norvégien, il va sonder les couches géologiques enfouies jusqu’à une profondeur de dix mètres pour complèter les analyses effectuées par SuperCam.

• PIXL (Planetary Instrument for X-ray Lithochemistry) : instrument américain, c’est un spectromètre de fluorescence à rayons X qui fournit des images à haute résolution pour déterminer la composition chimique des roches et des grains à la surface de Mars, jusqu’à une échelle microscopique.

• SHERLOC (Scanning Habitable Environments with Raman & Luminescence for Organics and Chemicals) : instrument américain, ce spectromètre utilisant un laser ultraviolet doit déterminer la composition moléculaire et détecter la présence de matière organique, à l’échelle microscopique.

• MEDA (Mars Environmental Dynamics Analyzer) : une station météorologique développée par l’équipe espagnole ayant fourni un instrument semblable pour la mission Curiosity.

• MOXIE (Mars Oxygen In-situ resource utilisation Experiment) : cet équipement américain est un démonstrateur dont la mission sera de démontrer la possibilité de produire de l’oxygène à partir du dioxyde de carbone présent à hauteur de 96 % dans l’atmosphère martienne.

Les premiers tours de roues de Perseverance seront accompagnés par le premier hélicoptère martien (un drone)  pesant 1,8 kilogramme nommé « Ingenuity » qui tentera le premier vol motorisé contrôlé sur une autre planète et testera durant 30 jours l’intérêt du recours à des vols de reconnaissance optique.

Ingenuity - NASA

Pour se déplacer Ingenuity est équipé de deux rotors bipales tournant en sens contraire entre 2 400 et 2 900 tours par minute, soit 10 fois celle des pales d’un hélicoptère sur Terre pour pallier la faible densité de l’air.

/// Zoom sur SuperCam, l’œil perçant de Perseverance

SuperCam est un maillon essentiel de la mission. Son oeil perçant constitué de 60 pièces optiques (lentilles et miroirs) est capable de réaliser ses analyses sans être contraint d’approcher au plus près de ses cibles pour sélectionner avec précision et rapidité les lieux de prélèvement des échantillons qui seront ensuite analysés sur Terre afin d’y détecter d’éventuelles traces de vie active, dormante ou passée. Pour la France, SuperCam représente un coût d’environ 40 millions d’euros, de la conception à l’exploitation à venir des données.

Comme ChemCam, SuperCam analyse la composition chimique des roches en tirant dessus au laser (technique LIBS appelée également spectrométrie sur plasma induit par laser) mais détermine en plus la composition minéralogique des roches en observant par spectroscopies Raman et infrarouge (IR) la manière dont les atomes sont organisés en molécules et les molécules liées entre elles.

Les techniques utilisées peuvent être mises en œuvre jusqu’à 7 m pour le LIBS, 12 m pour le Raman, et jusqu’à l’horizon pour la spectroscopie IR et l’imagerie. SuperCam peut ainsi faire ses analyses sans être contraint d’approcher au plus près de ses cibles, ce qui apporte un gain de temps important pour les opérations.

Les techniques dites « passives » d’imagerie et de spectroscopie infrarouge sont capables d’observer sur quelques km et jusqu’à l’horizon selon la transparence atmosphérique. La caméra couleur embarquée de SuperCam offrira une meilleure contextualisation des prélèvements de roches, alors que son microphone évaluera certaines caractéristiques des roches, comme la dureté par exemple, à partir de la mesure du bruit d’impact du laser LIBS sur la surface. Ce micro d’une bande 100 Hz – 10 kHz étudiera aussi le bruit du vent et donnera des indications complémentaires sur la météorologie de la planète rouge.

SuperCam emporte avec lui sur Mars 36 pastilles de matériaux dont la composition est parfaitement connue. Montées sur un porte-échantillon installé à l’arrière du rover, elles seront régulièrement « visées » par SuperCam pour étalonner les techniques d’analyse.

Parmi ces cibles, figure un fragment de météorite martienne (en haut à gauche) découvert dans un désert et identifié comme provenant de Mars par le Museum National d’Histoire Naturelle de Paris.

Éjecté lors d’un impact de forte puissance, ce petit bout de mars qui revient à son point d’origine est un grand voyageur spatial. Retombé sur terre avec un voyage autour du Soleil, il a aussi séjourné plusieurs mois à bord de l’ISS dans les bagages de Thomas Pesquet durant la mission Proxima et ainsi réalisé de nombreuses rotations autour de la planète bleue.

/// Atterrissage sur la planète rouge : 7 minutes d’angoisse

Partie du Kennedy Space Center de Cap Canaveral, en Floride (USA), le 30 juillet 2020 à bord d’un lanceur Atlas V, Perseverance a parcouru 471 000 000 km, soit environ 1300 fois la distance Terre-Lune ou 3 fois la distance Terre-Soleil.

La sonde a réussi son atterrissage sur le sol martien jeudi soir dans le cratère Jezero, un bassin d’impact de 45 kilomètres de diamètre sélectionné pour sa grande diversité géologique.

Cet ancien delta de rivière qui débouchait il y a 3,5 milliards d’années dans un lac offre en effet la possibilité de récolter des échantillons provenant de roches et de minéraux très variés, en particulier des argiles et des carbonates qui peuvent préserver des traces fossiles de vie ancienne.

L’atterrissage sur Mars de Perseverance est une des phases la plus délicate de la mission et s’est dérouler en 5 phases distinctes  : l’approche, la rentrée atmosphérique pilotée, la descente sous parachute, la descente propulsée et la dépose par l’étage de descente « Sky Crane », la Grue Céleste .

Dix minutes avant son entrée atmosphérique, la sonde spatiale s’est séparée de l’étage de croisière, avant d’ajuster cinq minutes plus tard son angle d’attaque en larguant deux lests de 75kg chacun.

Elle a ensuite débuté son entrée dans l’atmosphère martienne à une vitesse de 21 000 km/h (5,8 km/s) et poursuivi sa phase d’entrée atmosphérique pilotée durant laquelle elle a réduit sa vitesse à 1 510 km/h (420 m/s) en corrigeant les écarts par rapport à la trajectoire idéale en utilisant les quatre propulseurs de son bouclier thermique arrière.

La sonde corrige ainsi les variations locales de densité de l’atmosphère qu’elle traverse pour maintenir sa trajectoire vers le point d’atterrissage visé.

Environ 80 secondes après son entrée dans l’atmosphère, la surface externe du bouclier thermique était à son pic de température à 1 300°C.

A environ 11 kilomètres d’altitude et alors que sa vitesse était encore de 1 510 km/h environ le parachute de 21,5 mètres de diamètre s’est parfaitement déployer.

20 secondes plus tard, à environ 2,1 km d’altitude du sol martien, elle s’est séparer de son bouclier thermique et 90 secondes plus tard de l’étage de descente du bouclier arrière, auquel le parachute était attaché.

La phase de descente propulsée a alors débuté grâce aux huit moteurs de l’étage de descente qui a réaliser une manœuvre d’éloignement en abaissant encore la vitesse de la sonde de 680 km/h (190 m/s) à 6 km/h (1,7 m/s) entre 2 100 m et 20 m d’altitude.

Durant cette phase, la sonde est passée en navigation autonome assistée par l’imagerie de terrain (Terrain- Relative Navigation) elle-même alimentée par une caméra pointant vers le sol et capturant en continu les images pour les transmettre à l’ordinateur de bord.

20 mètres au-dessus du point d’atterrissage, soit 12 secondes avant le toucher, le rover a déployé ses roues.

Aussi tôt le contact avec le sol, les câbles se sont rapidement rompus pour libérer le Sky Crane qui s’est éloigné du point d’atterrissage avant de retomber au sol.

Le rover a touché le sol martien, en douceur, mais avec une vitesse verticale encore conséquente de 2,7 km/h (0,75 m/s). Ci-dessous un cliché du rover encore suspendu par les cables, pris par le Sky Crane quelques secondes avant de le libérer.

Seulement 2 minutes après son posé de roues sur la planète rouge Perseverance a transis trois images, dont celle-ci où l’on peut apercevoir son ombre projetée et dès le lendemain un premier cliché en couleur de son environnement martien.

Les scientifiques sur terre vont dans un premier temps faire la recette (test d’acceptation d’un projet) de Perseverance à la surface de Mars depuis le JPL (le Jet Propulsion Laboratory de la NASA, basé en Californie) et de SuperCam depuis le LANL (laboratoire du département de l’Énergie des États-Unis) et depuis le French Operation Center for Science and Exploration (FOCSE) situé au CNES.

La recette de Perseverance doit durée jusqu’en mai 2021, avant le début de la phase d’exploitation standard de SuperCam en alternance depuis le FOCSE et depuis le LANL qui doit se terminer en 2024. 

/// Revoir l’atterrissage du rover Perseverance

Perseverance est bien sur le sol martien arrivée à 21h55 (heure de Paris / UTC+02:00)

Vous pouvez revoir l’évènement en streaming ci-dessous.

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visuels : NASA, JPL, Caltech, CNES, ESA, DLR, CNRS

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