L’avionneur Boeing a publié ce mercredi 23 octobre un bénéfice net du troisième trimestre divisé par deux à 1.17 milliard de dollars, bien inférieur aux attentes en raison de la crise du 737 MAX, cloué au sol depuis mi-mars suite à deux crashs rapprochés qui ont fait 346 victimes. Dans ce contexte difficile, Boeing a aussi annoncé le report d’un an des premières livraisons de 777x à «début 2021» et la baisse des cadences de production de son autre gros-porteur le 787-9 qui, depuis son lancement, rencontre des problèmes de fiabilité moteur et de qualité.
La baisse ou plutôt la chute libre des livraisons du modèle 737 (-67%), modèle le plus vendu de la gamme Boeing, fait logiquement reculer le chiffre d’affaires qui s’établit à 19,98 milliards de dollars au T3 malgré une hausse de l’activité des divisions Défense (BDS) et Services (BGS). Les coûts de production explosent en raison de la baisse des cadences de production du MAX et du retard accusé sur les programmes 777x et KC-46, le résultat net de Boeing au T3 s’établit à 1,17 milliard de dollars, en recule de 50,6%. Le bénéfice par action ressort à 2,05 dollars selon les normes comptables GAAP et à 1,45 dollar selon les normes comptables non-GAAP. La trésorerie disponible et les titres négociables totalisent 10,9 milliards de dollars et assurent une importante liquidité au groupe dont le carnet de commandes total s’élève à 470 milliards de dollars, avec près de 5 500 avions commerciaux en commande.
Depuis la mi-mars 2019 et l’immobilisation de l’ensemble des 737 MAX en service dans le monde, Boeing concentre ses efforts pour apporter un “patch” au système MCAS pour le rendre sûr et permettre au MAX d’être rapidement certifié par les autorités aériennes. « Notre première priorité demeure la remise en service en toute sécurité du 737 MAX, et nous accomplissons des progrès réguliers dans ce sens », déclare Dennis Muilenburg, Directeur Général de Boeing. Pour établir les résultats du troisième trimestre, le Groupe s’est appuyé sur l’hypothèse selon laquelle la remise en service du 737 MAX sera approuvée par les autorités de réglementation à partir du quatrième trimestre 2019 avec une augmentation progressive des cadences de production du 737 de 42 à 57 unités par mois d’ici à la fin de l’année 2020. Une hypothèse qualifiée de «très optimiste» par des observateurs. Les principaux opérateurs de 737 MAX dans le monde ont une nouvelle fois récemment reculé la date de retour potentielle de l’avion dans leur programme de vol à la mi-février 2020. Une fois le feu-vert reçu des autorités, il faudra probablement encore un délais supplémentaire pour remettre progressivement l’ensemble des avions actuellement en stockage prolongé, parfois sans leurs moteurs, en état de vol.
Depuis les révélations faites ces derniers jours sur l’existence de messages échangés entre deux pilotes de Boeing en 2016 sur des potentiels problèmes avec le système MCAS, la pression s’accentue sur l’avionneur. Le PDG de Boeing Dennis Muilenburg, qui s’est vu il y a peu retiré sa casquette de Président du conseil d’administration du Groupe, sera d’ailleurs auditionné pour la première fois par les élus du Comité aux transports du Congrès américain le 30 octobre prochain.
/// La crise du MAX masque-t-elle d’autres problèmes ?
Ce mercredi Boeing en a profité pour annoncer le report à «début 2021» des premières livraisons de son 777X, contre fin 2020 comme initialement prévu. Décliné en deux versions, le 777-8 pour 384 passagers sur 16 000 km et le 777-9 pour 426 passagers sur 13 500 km, le 777x doit succéder au 777 et couper l’herbe sous le pied de l’Airbus A350-1000. Une décision justifiée selon Boeing par des problèmes dans le développement du nouveau moteur GE9X-105B1A de General Electric.
Le Roll-Out prévu en mars a été annulé et l’avion a depuis essuyé un problème avec l’une des portes Cargo qui a lâché lors d’un test de pressurisation au sol de l’avion. Une situation qui contrarie les plans pour la flotte d’Emirates, client de lancement du 777x, qui pourrait selon des spéculations finir par différer ou réduire sa commande de 150 exemplaires de 777X, options comprises.
Le groupe annonce aussi qu’en raison de tensions commerciales (NDLR : ralentissement des commandes et problèmes de qualité rencontrés sur certains appareils) qu’il va réduire pour «environ deux ans» le rythme de production du 787 «Dreamliner», qui passera à 12 appareils par mois contre 14 actuellement dès la fin 2020.
Les premières compagnies à avoir reçu le 787-10 Dreamliner se seraient plaintes auprès de Boeing d’un contrôle qualité médiocre, d’erreurs de production «inacceptables» et d’une qualité inégale entre un même type d’avion suivant son site de production. Une problématique récurrente, qui concernait essentiellement la ligne d’assemblage finale de Charleston, en Caroline du Sud.
Rappelons enfin que le programme KC-46, ravitailleur multirôle conçu à partir du Boeing 767 pour l’US Air Force, enchaîne les déconvenues et cumule des mois de retard. En janvier dernier Boeing a signé un accord lui octroyant un délais supplémentaire de quatre ans pour résoudre certaines failles des systèmes de ravitaillement en vol en échange d’une ristourne de 28 millions de dollars sur chaque appareil livré d’ici à cette échéance. En septembre dernier les 12 premiers exemplaires livrés l’US Air Force ont été interdits de transporter des marchandises et des passagers jusqu’à nouvel ordre à la suite d’un incident avec les fixations du plancher de la soute de l’avion ravitailleur.
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/// 737 MAX : des pilotes Boeing auraient identifié un problème du MCAS en 2016
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visuels : R.Khanna-Prade, Boeing et G.Février
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