La campagne d’essais en vol du monomoteur bi-place du constructeur belge Sonaca Aircraft en vue de l’obtention d’une certification EASA CS-VLA (ELA1) s’est terminée fin janvier. Le Sonaca 200 devrait ainsi bientôt disposer du précieux sésame attestant de ses capacités en vol et débuter dans la foulée sa carrière commerciale par la livraison des premiers avions prévus au plus tard au début du mois d’avril prochain.
Cette campagne d’essais de certification en vol s’est déroulée sans encombre du côté d’Avignon de manière à profiter d’un temps hivernal, reconnu comme plus clément dans le sud de la France. Après des modifications mineures apportées sur la structure, comme l’ajout de petits ailerons sur l’extrados de l’aile pour canaliser le flux d’air et augmenter la stabilité lors du décrochage, l’équipe des ingénieurs du Sonaca 200 s’est ensuite concentrée sur la conduite des essais de vrilles, l’un des points les plus critiques d’une campagne de certification d’avion léger. Les pilotes d’essais Sonaca ont ainsi effectué plus de 180 vrilles avec l’avion dans toutes les configurations possibles et imaginables pour démontrer aux autorités qu’il restait parfaitement bien pilotable et récupérable dans ce genre de situation. Une fois cette étape cruciale franchie, quatre vols de validation ont été réalisés la semaine dernière par deux pilotes de la DGA Essais en vol, qui ont pris les commandes du Sonaca 200 préalablement équipé de divers capteurs pour recueillir différentes données et valider les études fournies par le constructeur. La certification de classe EASA CS-VLA (ELA1) est attendue dans les prochaines semaines.
/// Premiers avions en cours d’assemblage final
Détenu à 65% par l’équipementier Sonaca et à 25% par The Airplane Factory, Sonaca Aircraft est installé sur l’aéroport de Charleroi en Belgique. En prévision de sa certification et suite aux premières commandes reçues l’année dernière, Sonaca Aircraft a débuté dès septembre 2017 la mise en place de la chaîne d’assemblage du Sonaca 200. « On a décidé de travailler en interne donc tout sera fabriqué dans les usines du groupe Sonaca. La fabrication des pièces et le pré-assemblage des sous structures seront faits en interne du groupe, tandis que l’assemblage final de l’avion sera réalisé par Sonaca Aircraft. » explique Pierre Van Wetter Co-Fondateur & Chief Commercial Officer de Sonaca Aircraft. Le constructeur dispose déjà des pièces pour la fabrication de dix avions : cinq avions sont actuellement en cours d’assemblage et deux déjà en phase d’assemblage final pour des clients belges impatients de recevoir leur nouveau biplace « made in belgium ». Les premières livraisons sont attendues dès la fin du mois de mars ou début avril pour la Belgian Flight School et Air Academy New CAG.
/// Taillé pour un usage intensif et pour l’apprentissage
Avec son dièdre positif et des lignes assurément racées, le petit avion laisse entrevoir au premier coup d’œil son agilité avec ses 9,15 m d’envergure pour 7,00 m de longueur. De conception métallique en aluminium, il embarque sous le capot un moteur BRP Rotax 914 F Turbo de 115 ch qui lui permet de croiser tranquillement à 95Kt en régime économique en ne consommant que 15 litre de carburant à l’heure.
Coté cockpit, un agencement en T des instruments sur la planche de bord permet au pilote de trouver immédiatement ses repères. L’élégant tableau de bord embarque dès la version de base tout l’équipement nécessaire pour les vols à vue VFR de nuit mais il peut aussi être garni en option d’un « glass-cockpit » Garmin 500 txi. Une option un peu onéreuse qui apportera un confort indéniable au pilote, particulièrement pour les longs voyages et les procédures d’arrivée/départ. Cette option d’affichage numérique représente environ 50 % des commandes enregistrées par le constructeur. « Nous avons de la demande d’écoles de pilotage qui souhaitent des configurations analogiques avec des instruments traditionnels et nous avons aussi de nombreux échanges notamment avec les compagnies aériennes intéressées par un avion équipé d’instruments analogiques pour un apprentissage ab initio du pilotage. A contrario d’autres écoles demandent directement d’avoir du Galss-cockpit car toute la formation se passe sur Glass-cockpit. Ce n’est pas pour des raisons de coûts mais pour une raison de philosophie de formation » confie Pierre Van Wetter.
/// Des évolutions et une version 4 places à venir
Sonaca Aircraft nourrit de grandes ambitions pour son petit bi-place. L’entreprise prépare plusieurs évolutions tout en gardant en tête le projet plus ambitieux d’un avion de voyage économique et robuste avec quatre vraies places pour accueillir confortablement passagers et bagages. Le constructeur à d’ailleurs récemment obtenu un DOA [Design Organisations Approvals] de la part de l’EASA. « C’est un énorme avantage aux yeux de l’EASA et à nos yeux également. Ce n’est pas obligatoire pour la classe CS-VLA mais c’est extrêmement important pour interagir une fois que l’avion sera en opération » nous confie Pierre Van Wetter. Le DOA permettra en effet à Sonaca Aircraft d’être plus autonome vis à vis de l’EASA de manière à effectuer des modifications, des réparations mineures au niveau de l’avion ou de re-designer certains éléments en respectant une procédure interne. « C’était un gros travail pour nous car on doit prouver que l’on a les bons réflexes, les capacités et les ressources suffisantes. Nos ingénieurs et moi même avons été interviewés par l’EASA pour tester nos connaissances techniques et nous avons été audités plusieurs fois pour voir et évaluer notre méthode de travail. Ce n’est pas facile à obtenir mais nous avons grandement bénéficié de notre expérience chez Sonaca qui travaille sous les DOA des plus grands avionneurs mondiaux. » ajoute Pierre Van Wetter.
Cette première expérience de certification pour Sonaca Aircraft lui a aussi permis de valider la différence importante des pré-requis entre un LSA (Light Sport Aircraft de moins de 600 kg de masse maximal) et un VLA (Very Light Aircraft d’une masse maxi inférieure à 750 kg). Le constructeur belge a d’ailleurs été jusqu’à s’inspirer de certains critères de dimensionnement de la CS-23, la classification au dessus, aussi bien au niveau des calculs qu’au niveau électrique ou du comportement en vol du Sonaca 200. « La CS-LVA n’est pas une petite certification de classe et le nombre de requis est très important. Chaque classe a sa raison d’être et ses requis de certification mais plus on avance dans la masse maximum au décollage, plus les requis sont extrêmement sévères. On entend souvent qu’un LSA peut forcement tout faire et répond au même requis qu’un VLA mais c’est loin d’être vrai. » insiste Pierre Van Wetter. Si Sonaca a choisi de se frotter aux critères de classes plus importantes, c’est que le constructeur souhaite pouvoir dans un second temps autoriser l’avion à réaliser des vrilles intentionnelles. La structure et d’ailleurs déjà prête avec son facteur de charge (+4,4G / -1,78G) pour pouvoir théoriquement réaliser sans problème les 4 vrilles nécessaires à la certification. Les ingénieurs travaillent déjà sur l’étude du câblage pour l’intégration du Garmin G500 txi à l’avion avec des évolutions pour un pilote automatique et préparent aussi une version IFR du biplace.
D’autres projets sont aussi à l’étude, comme l’ajout d’une motorisation plus puissante au Sonaca 200 de manière à proposer une version acrobatique. Enfin, le projet d’un quadriplace semble toujours d’actualité même si aucun calendrier n’est encore annoncé par le constructeur. « L’idée est toujours dans nos cartons. Nous avons simplement un design préliminaire pour une version 4 places mais nous concevrons l’objectif de construire une gamme. » commente Pierre Van Wetter. Une fois les premiers exemplaires livrés, Sonaca Aircraft devra s’attacher dans un premier temps à assurer un service après-vente de premier ordre pour garantir la meilleure disponibilité possible des avions aux différents clients et en particulier aux écoles de pilotage.
Sonaca Aircraft prévoit de construire et de livrer une quinzaine de Sonaca 200 cette année avant une montée en cadence de production dès 2019 pour atteindre 30 à 35 avions l’année prochaine. Sonaca Aircraft prévoit de déplacer son bureau d’études et son activité construction sur l’aéroport de Namur, pour y implanter sa future ligne d’assemblage final qui sera dimensionnée pour pouvoir produire 80 avions par an. L’aéroport de Namur doit commencer la construction début mai d’un hangar d’assemblage dont Sonaca Aircraft sera locataire et d’une piste en dur pour favoriser l’expansion de l’activité de construction aéronautique.
Visuels : Sonaca Aircarft
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