Les pilotes aux commandes du Boeing 737 MAX Ethiopian Airlines qui s’est écrasé le 10 mars en Éthiopie ont initialement tenté de suivre la procédure d’urgence définie par le constructeur pour couper le MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System) sans parvenir à récupérer le contrôle de l’avion. Voila les dernières révélations faites au Wall Street Journal par des personnes informées des conclusions préliminaires de l’enquête sur le crash du vol 302 d’Ethiopian Airlines qui a causé la mort des 157 personnes présentent à bord.

Boeing 737 MAX 9

Alors que les enquêteurs éthiopiens se préparent à publier dans les prochains jours leur rapport préliminaire sur l’accident, des informations sur la séquence d’événements qui ont précédé le crash basées sur des données extraites des enregistreurs de vols par le BEA ont été portées à la connaissance des journalistes américains. Ces éléments, qui doivent encore faire l’objet d’une évaluation plus poussée des enquêteurs, ébranlent quelque peu les certitudes du constructeur et de la FAA qui affirmaient que le système anti-décrochage MCAS pouvait être désactivé pour reprendre le contrôle de l’avion en coupant son alimentation électrique selon une procédure en trois étapes mentionnée dans le manuel de vol du 737 MAX. Une procédure qui a d’ailleurs été rappelée aux opérateurs dans les bulletins de sécurité émis par le constructeur et la FAA suite au crash fin novembre du vol Lion Air 610 dans lequel le système MCAS est aussi mis en cause. Le rapport préliminaire d’enquête sur le vol Lion Air 610 a récemment mis en lumière que l’équipage avait tenté à plusieurs reprises de couper le système MCAS (une douzaine de fois) en actionnant un interrupteur qui ne permettait que de contrer temporairement le système.

Selon les informations du Wall Street Journal publiées aujourd’hui, relayant des déclarations de personnes proches des enquêteurs, les pilotes du vol 302 d’Ethiopian Airlines auraient dans un premier temps réagi en coupant l’alimentation électrique des moteurs couplés au système MCAS avant de réengager le système pour faire face à un mouvement à piquer important et persistant de l’avion. Après avoir actionné une première fois manuellement la roue du Trim qui est située dans le cockpit (qui contrôle l’inclinaison de l’avion) et qui agit sur les mêmes surfaces mobiles que MCAS, l’équipage aurait ensuite réactivé l’alimentation électrique et utilisé des interrupteurs électriques du Trim pour tenter de relever le nez de l’appareil, réactivant au passage le système MCAS, qui aurait alors repris le contrôle de l’assiette forçant l’avion à poursuivre sa descente. Les enquêteurs s’interrogent sur les raisons pour lesquelles les pilotes ont réactivé le système automatisé au lieu de poursuivre la procédure standard de Boeing. Les premières actions manuelles que l’équipage a effectué n’ont peut être pas eu l’effet escomptai, expliquant pourquoi il aurait poursuivi avec de nouvelles actions hors procédure envisagent des responsables de l’industrie et gouvernementaux cités par le journal américain.

/// Des modifications attendues mi-avril

Depuis le second accident du 737 MAX le constructeur planche sur des modifications logiciels du MCAS, qui sera désormais couplé à deux sondes d’incidence AOA (Angle of Attack) au lieu d’une et bénéficiera d’une alarme visuelle « disagree light » placée sur la planche du cockpit pour alerter l’équipage d’un éventuel dysfonctionnement du système mais aussi sur la formation des pilotes à cette procédure spécifique. Le vice Président de la stratégie produit de Boeing a déclaré la semaine dernière « Nous sommes convaincus que les changements que nous apportons éviteront ces accidents. » Le constructeur a expliqué avoir rendu le système MCAS « plus robuste ». Ce dernièr ne pourra ainsi plus s’activer en cas d’incohérence entre les mesures des deux sondes d’incidence AOA (5,5 degrés ou plus). Il ne pourra s’enclencher qu’une fois et n’exercera jamais une force supérieure à celle que pourra exercer les pilotes pour le contrer et redresser l’avion.

Boeing 737 MAX 10

Après avoir présenté une première série de modifications aux opérateurs et aux régulateurs la semaine dernière, Boeing a été, lundi 1er avril, sommé par la FAA de retravailler sa proposition qui explique qu’ « un travail supplémentaire de la part de Boeing est nécessaire à la suite d’un examen du système de commandes de vol du 737 MAX afin de s’assurer que Boeing a identifié et traité de manière appropriée toutes les questions pertinentes. ». Une nouvelle proposition du constructeur est attendue d’ici le milieu du mois d’avril. Dès réception, la solution complète apportée par Boeing sera soumise à un examen rigoureux de sécurité insiste la FAA en expliquant qu’elle « n’approuvera pas la mise à jour du logiciel » tant que celle-ci ne satisfera pas à toutes les exigences de sécurité. « Nous travaillons pour démontrer que nous avons identifié et traité de manière appropriée toutes les exigences de certification que nous allons soumettre à la FAA pour examen dans les prochaines semaines », a déclaré Boeing. Ces modifications seront aussi évaluées de manière indépendante par les autorités de la sécurité aérienne de Transport Canada et de l’EASA avant de donner le feu vert au retour des vol en 737 MAX sur leur territoire c’est pourquoi il est aujourd’hui encore très difficile de pouvoir estimer une date de remise en service de l’avion.

Les opérateurs du modèle MAX sont pour l’instant contraints de naviguer à vue et de procéder à des ajustements des programmes de vols faute d’avions disponibles pour assurer les lignes ou à l’affrètement d’appareils auprès de compagnies tierces. C’est notamment le cas d’Air Canada, principal opérateur du Boeing 737 MAX au Canada et dont la flotte de 24 appareils est actuellement cloués au sol.

/// La FAA a-t-elle certifié le B737 MAX trop hâtivement ?

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visuels : Eurospot, G.Février et AAF

AAF /// END

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